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AÏSSA RAHMOUNE, AVOCAT, VICE-PRÉSIDENT DE LA LADDH, À L’EXPRESSION

« Chaque faction du système envoie des messages et passe à l’action par procédés et médias interposés » assure le vice-président de la Laddh et d’expliquer que le peuple dans sa révolution croit à la « primauté de l’intérieur sur l’extérieur et primauté du politique sur le militaire » le reste n’est que négation de la volonté populaire.

L’Expression : Qu’en est-il des arrestations présumées des hommes d’affaires et de la confiscation de leurs passeports par les éléments de sécurité de l’armée ?

Aïssa Rahmoune : L’interpellation et « l’arrestation » de Ali Haddad au poste frontalier de Oum Teboul au niveau des frontières avec la Tunisie vient démentir les informations et leurs sources du fait de la confiscation des passeports à un certain nombre d’hommes d’affaires impliqués dans des affaires de corruption et dilapidation, d’une part, d’autre part, je dirai qu’il s’agit aussi d’une grande manipulation, un scénario digne d’un film hollywoodien, visant à faire présenter l’institution militaire comme le Zorro de la République, cela rappelle les années 90 où la même institution s’est donné le rôle du sauveur de la République contre le « terrorisme islamiste ».
Les communiqués venant du parquet d’Alger donnent une liste noire des actionnaires du système, ces « hommes d’affaires » qui ont sévi depuis des années nous renseignent aussi sur la complaisance, le silence et la complicité de l’appareil judiciaire sur la prédation et la liquidation des fonds publics, ça confirme aussi que notre justice est l’un des instruments par lequel des clans du système règlent leurs comptes et décomptes. Pour preuve, le procureur général de la cour d’Alger déclare que « Ali Haddad est en audition suite à son interpellation dans un poste frontalier en essayant de faire sortir de la devise », sans citer une volonté d’ouvrir une enquête sérieuse sur les reproches faits au golden boy.

Je dirai que cette liste diffusée d’une partie du cartel et l’ouverture d’enquêtes sur le transfert illégal de fonds et devises et l’interdiction de quitter le territoire sonne comme une ruse, un chantage et une prise d’otages d’un clan contre l’autre. Je regrette que l’appareil judiciaire soit encore actionné à des fins politiciennes et ne va pas au fond des demandes populaires.

Ces actions ne paraissent-elles pas contradictoires avec les déclarations de Gaïd Salah qui a l’air plus de se plaindre que de montrer ses crocs ?

Chaque faction du système envoie des messages et passe à l’action par procédés et médias interposés, des fois en victimes et des fois en passant à l’offensive, on a vu défiler tous les syndromes possibles, c’est une victoire en elle-même, le plus dur bien sûr, reste à faire.
Ce système dans toutes ses composantes doit comprendre que le peuple n’est pas un bien vacant. Les potentats en connaissant l’attachement et l’amour de l’Algérien pour sa patrie, font passer toutes les lois, décisions et orientations scélérates qu’ils veulent. Ça c’est du passé et c’est dépassé.

Je vais être clair ni la Présidence ni le chef de corps d’armée ni la police politique ne peuvent remettre en cause la révolution du peuple algérien, ce dernier ne veut pas de réformes ni de réaménagements du pouvoir ni un nouveau tuteur, le message est clair, assumé et délibéré, le peuple ne veut plus de votre système ni d’aucun autre système dominant et méprisant.

Le président a annoncé qu’il démissionnera avant le 28 avril prochain...

Le communiqué de la Présidence annonçant la démission du président avant le 28 et une volonté d’accompagner la transition est nul et sans effet, c’est un autre acte de prise d’otages, mais cette fois par un autre clan du système, le communiqué ne s’adresse pas au peuple, ce dernier est dans l’après-système d’ailleurs, depuis le 16 février « marche de Kherrata » que le peuple a réglé le problème de la vacance de la présidence de la République, le peuple et la société civile sont dans l’étape du départ de tous les clans du système et la construction de la IIe République, on est en avance car des organisations, des comités de quartiers, des collectifs d’avocats et d’autres corporations travaillent sereinement sur ce que peut être la IIe République.
La démarche du collectif d’avocat pour le changement et la dignité est intéressante dans ce sens.
On attend une seule lettre, c’est celle des modalités pratiques et les termes techniques du départ des cliques politiques, oligarques et militaires du pouvoir.

Quelle lecture faites-vous de la position du peuple dans la rue, les déclarations de la Présidence et de Gaïd Salah ?

Ce qu’on consulte comme initiative du peuple à travers des propositions, plateformes citoyennes et discussions organisées par le peuple, est inédit dans l’histoire de l’humanité, en l’espace d’une annonce de candidature, les Algériens ont fait sortir tout le cumul de connaissances et dynamiques, cette force de proposition est le fondement d’une nouvelle ère. On est devenu maître de notre destin, la formation du gouvernement Bedoui est un « non-événement », l’équipe de Bedoui est refusée dans le fond et la forme, idem pour tous les clans qui tentent de se repositionner, pervertir et trahir la deuxième révolution algérienne. Souvenez-vous que Lakhdar Brahimi et Ramtane Lamamra sillonnèrent les capitales du monde pour un soutien et une offre de service, je vous rappelle aussi que Gaïd Salah, depuis le déclenchement des événements, avec un air menaçant en premier lieu et durant ses six interventions et une lettre s’invite dans le débat politique. On doit rappeler à ces gueux qui nous gouvernent, une seule plateforme politique, celle de la Soummam. « Primauté de l’intérieur sur l’extérieur et primauté du politique sur le militaire », le reste n’est que négation de la volonté populaire.

l’Expression 03/04/2019