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Déclaration commune : Ensemble contre la peine capitale

La promotion de la dignité humaine et la consécration des droits de l’homme constituent un repère fondamental de l’évolution de l’humanité à l’époque moderne. Il est maintenant entendu de tous que l’équité et la justice ne peuvent être durablement établies si elles n’ont pour finalités la protection et l’épanouissement de la personne humaine, objectifs consubstantiels au respect de la vie.

La peine de mort dont les origines remontent aux temps les plus reculés de l’histoire contredit cet idéal. Elle constitue une violation des droits fondamentaux de l’homme que justifie mal l’argument, louable en soi, de protection absolue de la société.

Cette sentence réalise et légalise un anéantissement de l’être humain. A ce titre, elle représente une négation définitive du droit à la vie de l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 reconnaît à « tout individu », ce même droit que l’article 6 du pacte international relatif aux droits civils et politiques considère également comme « inhérent à la personne humaine ».
Aucune autorité publique, aussi légitime soit-elle, n’est moralement fondée à interdire à ses citoyens du tuer tout en s’arrogeant, pour elle même, le droit d’infliger la mort !
Forme de punition dégradante, la peine de mort consacre légalement une cruauté sans cesse illustrée par les révoltantes et inévitables tortures qui accompagnent toutes les exécutions capitales.
De par sa nature même, cette peine est la seule à revêtir un caractère à la fois irréversible, irrévocable et irréparable. Elle établit de ce fait, au bénéfice de l’homme et de la justice humaine, un postulat d’infaillibilité quotidiennement démenti par les faits.

Aux côtés des cas de grâce trop rares, les condamnés à mort réhabilités, après les exécutions, mettent en cause les responsabilités des gouvernants des Etats concernés et interpellent gravement la conscience de l’humanité.
Que dire, lorsque l’on sait que la condition sociale modeste d’un condamné ne lui a souvent pas permis de bénéficier des meilleurs moyens de défense ! L’injustice de la mesure est encore plus révoltante lorsque l’on pense aux régions du monde où la race, le sexe ou l’opinion de l’accusé ou encore les marchandages de l’appareil judiciaire avec ses co-accusés, peuvent précipiter sa condamnation à mort.

Il n’existe, nulle part au monde un système absolument à l’abri de l’erreur judiciaire, des dépassements d’agents de l’Etat ou de l’insuffisante consécration des droits de la défense !
La sentence de la peine de mort est l’une des rares dernières positions de retranchement d’une conception de la justice qui fait du châtiment d’un forfait d’une démarche vengeresse de la société.
Loin de permettre au condamné d’accéder au pardon de sa victime et de la société ou au repentir, ni d’expier ou de réparer sa faute, la peine de mort lui renie et lui interdit toute forme de réhabilitation ou de deuxième chance.
Aucun homme ne peut prétendre juger dans l’absolu de la capacité de son semblable à s’amender !

Quand au prétendu effet dissuasif de cette sanction suprême, il n’a, à ce jour, jamais été prouvé par aucune étude scientifique. Bien au contraire les exemples statistiques du phénomène inverse sont légions de par le monde.
Quoique divers textes de sa législation consacrent la peine de mort, notre pays n’est pas, en dehors d’une courte période et en comparaison d’autres Etats, celui qui a le plus recouru à cette solution judiciaire extrême.
A jamais marqué dans sa mémoire par la guillotine injustement et cruellement infligée, hier, par le colonialisme, aux héros de la libération nationale, et désireux de se joindre au mouvement mondial de promotion des droits de l’Homme, notre peuple aspire profondément au respect de la vie et de la dignité humaine.

Observant, depuis 1993, un moratoire sur les exécutions capitales, l’Etat algérien est attentif aux recommandations de l’ONU et de la société mondiale. Par ailleurs, l’Algérie a ratifié la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 et le pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples et la charte arabe des droits de l’homme. Facteur favorisant, la constitution accorde la primauté au droit international sur le droit interne. Il vient de reconduire pour la deuxième fois son soutien à la résolution de l’ONU appelant à un moratoire sur les exécutions capitales.
L’opinion internationale tend résolument vers l’abandon de cette sanction pénale. Plus de la moitié des Etats dont les pays musulmans ont déjà aboli la peine de mort.

Aujourd’hui, le temps est venu pour l’Algérie, d’harmoniser sa législation pénale avec le droit international en franchissant le dernier pas vers l’abolition de cette abominable sentence.

Alger le 10 octobre 2014

Les signataires :

Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme LADDH
Ligue Algérienne des Droits de l’Homme LADH
Rassemblement Action Jeunesse RAJ
SOS Disparus- CFDA
Réseau des avocats de défense des droits de l’Homme RADDH
Réseau WASSILA
Maître Miloud Brahimi, Avocat
Maître Mostefa Bouchachi, Avocat
Maître Lekhdari Med Seghir, Avocat
Maître Ali Brahimi, Avocat
Mr Hakim Adad, Militant politique

Ps : Cette déclaration reste ouverte à la signature à l’adresse : contact@la-laddh.org